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Coup Fatal sur la Liberté de la Presse au Congo Brazza

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LA GRIFFE, LA VERITE ET LE NOUVEAU REGARD

Encore Trois Journaux Suspendus

La-griffeCette décision prise en réunion extraordinaire tenue, le 5 décembre 2013, par le Conseil Supérieur de la Liberté de Communication (CSLC) du Congo Brazzaville a étonné plus d’une personne. Avec la suspension de ces trois journaux, la liberté d’expression vient donc de prendre un coup au Congo Brazzaville. Nous avons interrogé Monsieur Sébastien Patrick DZEBA, Directeur Général de la publication du journal LA GRIFFE, sur le motif réel de cette sanction contre son journal. Voici ce qu’il nous a répondu.

Propos recueillis par : Patrick Eric Mampouya

Patrick Eric Mampouya : Nous avons appris avec tristesse la décision du Conseil Supérieur de la Liberté de Communication contre votre journal. Pouvez-vous nous dire le motif réel de cette décision ?

Sébastien Patrick DZEBA : Merci de m’avoir accordé cette interview. Je vous dis tout de suite que c’est triste d’être né dans un pays où les dirigeants de certaines institutions continuent de vivre avec l’esprit primitif et d’ignorer que l’application de la loi répond aussi à des règles préétablies.

Professionnel de la communication, j’exerce ce métier depuis plus de 20 ans, je n’ai jamais vue ni entendu un organe de presse suspendu sans motif notifié aux gestionnaires. C’est au Congo Brazzaville que je viens de le constater, pire encore, c’est au 21e siècle dit siècle de lumière.

Quand l’icone mondiale Nelson MANDELA disait "que le soleil ne se couche jamais sur une réalisation humaine aussi éclatante", il y a encore au Congo Brazzaville certains dirigeants qui veulent soustraire la liberté d‘expression et d’opinion acquises chèrement et veulent nous ramener à l’ère du mono dont ils sont, sans doute, nostalgiques.

C’est donc regrettable de constater que dans notre pays qui se veut démocratique, une personne peut se réveiller un bon matin, organiser une réunion, semble t-il, extraordinaire et décider de la suspension ou de l’interruption d’un organe de presse légal. C’est triste de le constater mais la réalité est là.

Pour répondre à votre question, je vous dis tout de suite que nous n’avons jamais été notifiés de cette décision et nous ne connaissons pas le pourquoi de celle-ci. C’est au président Philippe MVOUO et son conseil de répondre à une telle question.

Patrick Eric Mampouya : Vous ne savez donc pas le pourquoi de cette décision et vous n’avez jamais reçu de notification. Comment avez-vous appris cette triste nouvelle ?

Sébastien Patrick DZEBA : L’information nous a été rapportée par des amis et des lecteurs qui ont suivi le journal télévisé de 20 heures le 5 décembre 2013. Aussitôt informé, j’ai moi-même téléphoné certains amis au Conseil Supérieur de la Liberté de Communication qui ne savaient rien de cette information.

Le lendemain, j’ai appris par les vendeurs de journaux que mon journal était saisi dans les kiosques et un vendeur était arrêté. Je me suis rendu au cabinet du Conseil Supérieur de la Liberté de Communication où on m’a présenté un conseiller qui n’a pas pu me donner des explications à ce propos.

J’ai appelé, le secrétaire général du CSLC et le président des éditeurs des journaux en vain. Bref, vous constatez avec moi que nous ne savons rien du tout. C’est une décision qui émane, sans doute, d’une dictée venant de quelque-part puisqu’elle a été prise en extraordinaire.

Patrick Eric Mampouya : Pensez-vous avoir offensé une autorité dans vos écrits ?

Sébastien Patrick DZEBA : J’exerce ce métier depuis plus de 20 ans, je vous l’ai signifié tout à l’heure. Même si offense il y a eu, à ma connaissance, le législateur a prévu deux voies de recours pour une personne offensée. Il y a le droit de réponse et la citation directe. Mais, il n’y a rien eu de cela.

Et, je vous annonce que La Griffe créée depuis 2006 n’a jamais été interpellée ou auditionnée par la Police, ni par le Procureur de la République et non plus par le Conseil Supérieur de la Liberté de Communication.

Pire encore, le Journal LA GRIFFE n’a connu que deux mises au point en huit ans de gestion de ce journal par contre des droits de réponse sont publiés dans d’autres journaux.

S’il y a cinq titres au Congo Brazzaville, La Griffe est parmi les trois premiers les plus lus de ce pays. Alors, pensez-vous que si nous exerçons mal notre métier nous aurions un tel palmarès ?

Non. A mon entendement, s’il ne s’agit pas d’une erreur d’appréciation, il y a donc anguille sous cette décision.

Patrick Eric Mampouya : On entend dire que les autorités de notre pays ne veulent pas voir des journaux dits "opposition". Confirmez-vous cette information ?

Sébastien Patrick DZEBA : C’est une information non officielle, mais au regard des suspensions qui tombent comme une avalanche de neige ont peut dire que cette idée peut prendre corps ; rappelons que 6 titres de journaux ont été suspendus en 1 mois et que tous ces journaux suspendus sont taxés d’opposition parce qu’ils sont très critiques.

Patrick Eric Mampouya : On dit aussi que les journaux traqués par le Conseil Supérieur de la Liberté de Communication depuis l’arrivée de Philippe MVOUO sont ceux dirigés par les ressortissants du sud, notamment LA GRIFFE votre journal, LA VOIX DU PEUPLE, LA VERITE, TALASSA, LE GLAIVE, LE TROTTOIR, LE NOUVEAU REGARD, SEL-PIMENT etc. Vrai ou faux ?

Sébastien Patrick DZEBA : C’est vous qui faites ce constat, mais je pense que votre analyse peut être fondée puisque tous ces journaux ont été suspendus et aucun organe de presse soutenu par des gens qui ont des accointances avec ceux du pouvoir n’est sur cette liste.

Patrick Eric Mampouya : Peut-on dire que vous êtes victimes d’une dictature ?

Sébastien Patrick DZEBA : Si dans un pays de Droit, l’interpellation d’un taximan commence par un coup de sifflet du policier routier, chez nous, la suspension d’un journal ne répond à aucune notification au préalable. Je pense que nous sommes dans un pays où la loi est battue en brèche par des intérêts égoïstes qui aliènent même les facultés intellectuelles.

Patrick Eric Mampouya : Que comptez-vous faire suite à cette décision ?

Sébastien Patrick DZEBA : Je vais me rapprocher du secrétariat du Conseil Supérieur de la Liberté de Communication pour connaitre le motif réel de cette décision. Si les raisons ne sont pas fondées, je saisirais les juridictions compétentes.

Patrick Eric Mampouya : Etes-vous certain de la recevabilité d’une telle plainte sous ce régime ?

Sébastien Patrick DZEBA : Je sais ce que vous voulez dire. Mais, je pense que même après ce régime, la justice tranchera. Les pouvoirs passent mais les plaintes ne pourrissent jamais.

Patrick Eric Mampouya : Pour l’heure, que faites-vous de vos collaborateurs ?

Sébastien Patrick DZEBA :Ecoutez, je vais les inscrire dans les annales des chômeurs crées par le Conseil Supérieur de la Liberté de la Communication parce qu’il vient de plonger plusieurs enfants dans la famine.

Patrick Eric Mampouya : Vous avez plus de 20 ans de métier. Mettez-vous fin au journalisme ?

Sébastien Patrick DZEBA : Non, je me mettrai au service de tous ceux qui luttent pour la liberté de presse et d’opinion dans ce pays. Après plus de 30 ans de bâillonnement, nous n’accepterons plus que ces libertés soient une fois de plus bafouées. Même ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui en auront besoin quand ils nous rejoindront dans le camp des opprimés d’autant plus que le pouvoir est comme une roue ; ça tourne.


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