La conscience d’un peuple : un outil primordial pour assurer le développement économique et social en Afrique !
Par José MASANGI
Les africains sont en général d'un naturel aimable et courtois. Le respect des amis, de la famille et de la communauté leur parait primordial. Les
formules de politesse comme « S'il vous plaît » ou « Merci » sont peu utilisées au cours de leur
conversation. Ils les estiment inutiles et préfèrent privilégier les actes à la parole. Comme disait l’auteur-compositeur-interprète français Daniel Balavoine : « Mettre du concret dans une action ».
Mais par contre, la notion de temps est particulièrement souple au congo comme sur le reste du continent et ne revêt pas la même importance que dans les sociétés occidentales. Ainsi, en lingala, il n'y a qu'un seul mot pour dire à la fois « hier et demain » : « lobi »; c'est le contexte qui explique clairement si l'on parle de la veille ou du lendemain.
En afrique où perdure une longue tradition d'hospitalité, rendre visite revêt une certaine importance ; la famille ou les amis ne fixent pas toujours un rendez-vous pour aller rendre visite à leurs proches. Ils peuvent débarquer à l’improviste, cela parait tout à fait normal et acceptable.
L'individualisme ne serait toléré que dans la mesure où il ne s'oppose pas aux besoins de cette communauté. Inspirés par un sentiment de solidarité naturelle, certains leaders africains pour attirer les investisseurs nationaux et internationaux affirment: « Nous savons mieux que quiconque qu'il y a place dans ce continent riche pour une rémunération honnête et justifiée du capital privé, mais à la condition que ce capital contribue effectivement au développement économique, à la promotion sociale de la population, et ne devienne pas une entrave dans la direction de l'Etat et à la réalisation de notre vocation à la liberté et à l'indépendance. ».
Voilà une pensée positive qui devrait interpeller tout le monde, aussi bien la population et les politiques africains que les partenaires étrangers. C’est comme si ces leaders politiques donnaient une leçon de morale à tous ceux qui spéculent et ne misent pas sur des véritables projets de développement. C’est comme s’ils disaient qu'ils devraient montrer l'exemple en mettant leur argent au service des entreprises plutôt que de le placer dans des paradis fiscaux. C’est comme s’ils avaient finalement une crainte que les capitaux étrangers n'entravent le fonctionnement de nos institutions publiques.
L'absence d’une meilleure alternance du pouvoir, d’une bonne organisation administrative, judiciaire et d’un code des investissements ne pourraient rassurer ni les investisseurs, ni les politiques eux-mêmes.
Au-delà de la solidarité naturelle africaine et de son hospitalité, malgré les bonnes intentions de vouloir changer de mentalité pour développer l'Afrique, il faut des actes concrets. Les autorités africaines doivent mettre sur pied une véritable politique de gestion des ressources humaines. Elles doivent pour cela, mettre en place des outils susceptibles de stimuler la croissance.
Les premiers outils, ce sont les hommes et les femmes. Quels que soient leurs domaines et compétences, ils doivent être placés au bon endroit et soutenus par des structures étatiques (l'administration publique et tout le système judiciaire).
Ce sont eux qui rapportent de l'argent sous forme d'impôts à l'état, et créent les emplois pour permettre à la population d'avoir des revenus.
Ce sont eux qui, grâce aux impôts qu'ils paient, permettent à l'état de garantir un minimum de bien-être à la population et financent les entreprises sous forme d'aide à l'investissement.
Ce sont eux qui transforment les richesses naturelles en produits finis. Ils jouent ainsi deux rôles majeures favorables à la croissance économique: - producteurs et consommateurs des biens et services.
Le second outil, c’est l'argent que l'état met à la disposition de tout entrepreneur, opérateur économique sous forme de crédit. Comment voulez-vous que les banques ne tombent pas en faillite, quand elles ne prêtent pas de l'argent à ceux ou celles qui en ont besoin pour stimuler la croissance.
Il est vrai que la plupart des gens ne disposent pas suffisamment de garantie pour mériter la confiance des banquiers. Mais l'état est-il prêt à se porter garant, dans certaines conditions, dans le cadre des structures d’aide à l’emploi qu'il pourrait mettre en place ?
Le troisième outil est la confiance réciproque que tout citoyen peut donner à l'autre. Il n'y a pas de mixité sociale relative en Afrique.
La distance qui sépare l'élite intellectuelle du reste de la population est double. Par sa position sociale et connaissance scientifique, l'élite se sent investi d'un pouvoir suprême que l'autre n'a pas. Elle a droit à une rémunération exorbitante et être craint ; l’appeler monsieur ou madame serait un manque de respect à son égard, il faut l’appeler « Excellence, Honorable, Professeur, Pasteur…).
Comment voulez-vous qu'il y ait une complicité entre le dirigeant et le dirigé ? Deux complexes de supériorité et d'infériorité s’affrontent et prennent des ramifications dans toute la société, avec comme conséquence majeure : le manque de confiance à nos institutions et aux dirigeants. La confiance est un élément fondamental dans les relations interhumaines et interentreprises.
Depuis les années 60 qui nous rappellent encore beaucoup de souvenirs (la colonisation, les indépendances, le temps où les routes étaient en bon état, le temps où il y avait des bonnes écoles, où l'administration publique assurait des services de qualité à la population), la communauté africaine attend de ceux qui ont pris la gestion de la chose publique, de le faire en bon père de famille.
La parole donnée est un autre outil qui implique les parties dans une relation de confiance et de sécurité, dans le respect des engagements. Très souvent, cet outil nous échappe. C'est facile de changer d'avis. On vit comme un caméléon, en épousant la couleur de l'environnement qui lui est proche : sa région d'origine. Et quand sa région d'origine devient hostile, on se rabat sur sa tribu, son clan et finalement sa famille, jusqu'au plus petit commun numérateur (soi-même).
La parole donnée est la règle d'or pour mériter le crédit du monde des affaires, politique ou du commun des mortels qui nous regarde.
La conscience d'un peuple est un outil primordial pour assurer son développement. Quand on détruit tout un hôpital qui hébergeait les malades, quand on saccage les magasins qui permettaient à la population de trouver à manger ou un emploi, quand on démolit toutes les infrastructures de l'état comme si demain on n'en aura plus besoin (…), on ne pourra jamais aspirer au développement.
Il est temps que les Africains prennent leur destin en main; les partenaires étrangers ne pourront qu'accompagner le processus déjà entamé, s'il y a des signes manifestes de changement réel de mentalité.